" Je trouverais de la bonté dans le regard d'un huissier que je ne serais pas plus abasourdi." Frédéric "San Antonio" Dard
Patrimoine & Savoir-faire
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Interview Nathalie Mathilde Jean Louis : son parcours

Le 17 décembre 2014
Malik
Malik "Pifpaf" Bahri
L'auteur.
Nathalie (1)

 

  • Bonjour à tous, voici l’ITW de NMJL.

 

Malik Bahri : Bonjour Nathalie, pourriez-vous vous présenter rapidement ?

NMJL: Nathalie-Mathilde Jean-Louis, Franco-Suisse, 35ans, artiste et angleuse.

MB : L’art de l’anglage ?

NMJL : L’art de vivre ! C’est d’ailleurs le nom de mon entreprise de décoration, VidaYHado, vie et destin en Français.

MB : Vous étiez destinée à l’horlogerie ?

MNJL : Initialement non, je souhaitais vivre de mon art, ma grand-mère Suisse m’avait d’ailleurs déconseillé ce métier, elle a connu la crise du quartz…
J’ai toujours eu des facilités en dessin et une certaine fibre artistique, j’ai poursuivi un cursus artistique et je suis sortie du lycée artistique avec mon diplôme en 2000. J’ai ensuite essayé de vivre de mon art.

Nathalie Mathilde Jean LouisNathalie Mathilde Jean Louis

 

MB : A quelle occasion vous êtes vous tournée vers l’horlogerie ?

NMJL : En 2004, j’ai répondu à une annonce de Piaget à la Côte-aux-fées, ils cherchaient des gens pour faire du finissage, ils demandaient une certaine habileté manuelle.
J’ai rejoint Piaget avec beaucoup d’enthousiasme, mais les débuts m’ont refroidie : j’ai dû commencer au bas de l’échelle, j’approvisionnais une commande numérique qui réalisait les perlages sur les platines des mouvements de base de chez Piaget ; être servante d’une machine outils ne me permettait pas de m’accomplir.

Je suis néanmoins restée très studieuse et impliquée. Au bout de quelques mois, j’ai demandé à mon chef de pouvoir évoluer, il a accepté. C’est la beauté du système professionnel Suisse, la méritocratie est réelle.
J’ai ensuite évolué au sein de l’atelier de décoration de Piaget, ce n’est pas un moment où j’ai ressenti une révélation horlogère, je travaillais beaucoup avec des instruments électriques, finition au micro moteur, avec des gommes anglages…

MB : Mais vous l’avez ressenti plus tard ?

NMJL : Effectivement, en 2007 j’ai répondu à une annonce d’une maison alors presque inconnue : Greubel Forsey. J’ai été prise en charge par Séverine Vitali (la responsable de l’atelier de décoration GF) et cela a été pour moi un énorme bond en termes de qualifications. Séverine m’as transmis plus que des compétences : la passion.

c’est un métier d’art, la motivation est personnelle.

Auparavant, je travaillais principalement à la machine ; mais dans l’atelier déco de Greubel, j’ai appris la décoration manuelle traditionnelle. Le niveau d’exigence était très élevé et beaucoup de mes collègues ont craqué, la pression qualitative était extrêmement forte. Moi, au contraire, je m’y suis épanouie. Il faut dire qu’à ce niveau, c’est un métier d’art, la motivation est personnelle.

J’ai d’autant plus apprécié cet apprentissage chez GF que je n’aime pas la pression sur la quantité, ici la démarche était à l’opposé : la qualité absolue au mépris de la productivité. On passe des mois à vraiment perfectionner nos techniques avant de commencer à regarder le nombre de composants terminés. C’est dans cet atelier de décoration que j’ai appris à faire des anglages, notamment des angles rentrants à la lime. J’y ai même développé une nouvelle technique de polis de surface, où les rendus sont plus poli noir/bloqué que poli miroir.

Nathalie Mathilde Jean LouisNathalie Mathilde Jean Louis

MB : Pourquoi avez-vous fondé VidaYhado ?

NMJL : En 2011 j’avais soif de liberté et  je pensais un peu avoir fait le tour de mon travail chez Greubel Forsey ; Je souhaitais changer de contexte pour faire évoluer mon art, mais un autre poste de salarié ne m’aurait rien apporté de plus que GF. L’indépendance était la condition sine qua non, qui me procurerait la liberté créative vitale.

MB : Vous travaillez beaucoup ?

NMJL : Environ 200-250h/mois, ce qui peut paraitre beaucoup, mais en fait ce n’est rien lorsqu’on est animé par la passion.

Si l’entreprenariat est un risque personnel, c’est aussi très gratifiant, tant sur le plan de la confiance en soit que de la motivation. Mes clients me soumettent de nouveaux projets fréquemment, ce qui me permet d’éviter toute lassitude. L’argent est assez secondaire dans l’indépendance : ce qui compte est que l’aventure au quotidien nécessite une implication personnelle, un œil, un doigté accrus, ce qui est au final bien meilleur pour le moral que certain postes salariés lénifiants…

MB : En ce qui vous concerne, vous êtes transparente sur vos Savoir-faire ?

MNJL : Je suis très confiante par rapport à cela. Je n’ai aucun problème à divulguer mes savoir-faire. Le savoir est une chose, le pouvoir en est une autre. Partager n’est pas un souci, il n’y a pas de brevets sur la déco et connaître une technique ce n’est pas la maîtriser. Et puis mes techniques s’appuient sur ma créativité artistique et l’imagination est quelque chose qui ne s’apprend pas.

Nathalie Mathilde Jean Louis

MB : Dans une prochaine série de sujets, je souhaiterais que nous abordions vos techniques de finition en détail, est-ce que ça  marche pour vous ? Mon objectif est d’éduquer les passionnés sur internet.

NMJL : Je serais ravie de participer à l’éducation des passionnés d’horlogerie, en espérant que les maisons d’horlogerie nous suivront aussi.

MB : Je crois savoir que vous êtes actuellement sur un nouveau projet joailler ?

NMJL : Effectivement, je veux appliquer mes techniques de finitions horlogères à des pièces de joaillerie, mon objectif étant de marier mes finitions et l’art de la bijouterie.
La première pièce sera un pendentif à environ 10000chf, en pièce unique.

MB : Merci Nathalie, on se parle bientôt pour que vous expliquiez votre art en détail ?

NMJL : Certainement. Merci et à bientôt.

  • A bientôt les amis!